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dimanche 3 mars 2013

MAPA et publicité par Benoit Fleury


MAPA et publicité par Benoit Fleury


 « Si cela va sans le dire, cela ira encore mieux en le disant ». Le tribunal administratif de Lyon vient de faire sienne ce bon mot de Talleyrand en rappelant que l’obligation de publication d’un avis d’attribution d’un marché public peut revêtir une forme différente que l’avis d’appel public à la concurrence en marché à procédure adaptée (TA Lyon, 4 oct. 2012, Sté SIC Etanchéité, n° 1002733).

1 – Les faits


En l’espèce, la commune de Dardilly a lancé une procédure adaptée en vue de la passation d’un marché portant sur l’exécution de travaux de réhabilitation des bâtiments d’un groupe scolaire par la publication d’un avis d’appel public à la concurrence le 12 octobre 2009 sur le site internet « marchesonline » et le 16 octobre dans la revue La Moniteur.
La société SIC Etanchéité s’est portée candidate à l’attribution du lot relatif à l’étanchéité, mais son offre a été rejetée au motif qu’elle n’était pas conforme aux cahiers des clauses techniques particulières. Le marché correspondant a été signé le 10 décembre 2009 et un avis d’attribution a été publié par la commune le 9 janvier 2010 sur le site internet de la revue Le Moniteur des travaux publics et du bâtiment, précisant le nom de l’attributaire, le montant toutes taxes comprises du marché ainsi que les modalités de consultation en mairie de ce contrat.
La société évincée contesta cependant son éviction devant le juge administratif en se prévalant d’une erreur manifeste d’appréciation. La commune de son côté arguait de l’irrecevabilité de la requête du fait de son caractère tardif. La société dénonça alors les modalités de publicité de l’avis d’attribution, déplaçant ainsi le contentieux sur le terrain formel.

2 – Question


Il convient ici de rappeler qu’effectivement l’article 85 du code des marchés publics impose la publication d’un avis d’attribution dans les 48 jours suivant la notification du marché. Il s’agit là d’un délai maximal. Cette publication constitue le point de départ des délais de recours : un mois pour le référé contractuel (article R. 551-7 du code de justice administrative), deux pour contester la validité du contrat à condition, dans ce dernier cas, que la publication de l’avis d’attribution puisse être regardée comme une « mesure de publicité appropriée » au sens de la fameuse décision Tropic du Conseil d’Etat (CE 16 juill. 2007, Sté Travaux Tropic Signalisation, n° 291545).
Benoit-FleuryUn avis d’attribution correctement rempli et répondant aux exigences du fixées par le II de l’article 85 du code des marchés publics précité, c’est-à-dire une publication sur le ou sur les mêmes supports que ceux ayant servi à la publication de l’avis d’appel public à la concurrence, et selon les mêmes modalités de transmission, sera en toute logique considéré comme une mesure de publicité appropriée.

3 – Position du TA de Lyon


Mais ce parallélisme des formes est-il systématiquement obligatoire ? La réponse du tribunal administratif de Lyon est clairement négative. Ainsi en marché à procédure adaptée, il ne sera pas nécessaire d’utiliser un avis d’attribution en bonne et due forme, ni même de s’imposer un quelconque parallélisme des formes entre l’avis de publication du marché et l’avis annonçant la conclusion du contrat :
« aucun principe général non plus qu’aucune règle ne s’oppose à ce que la publication d’un avis d’attribution d’un marché passé selon la procédure adaptée prenne la forme d’une mise en ligne sur un site internet spécialisé dans le domaine de la commande publique ; […] toutefois ce mode de publicité n’est susceptible de faire courir le délai de recours contentieux à l’égard de toutes les personnes susceptibles d’avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester le contrat qu’à la condition que cette information soit suffisante et accessible ».
Benoit-Fleury
Une publicité « appropriée » s’entend donc ici d’une « publicité suffisante et accessible », laquelle s’appréciera au regard des opérateurs économiques concernés et de l’audience du support utilisé. En l’espèce,
« eu égard à la nature du marché, aux caractéristiques du site choisi, spécialisé dans le domaine de la commande publique, et accessible à tous les professionnels du bâtiment […], une telle publication doit être regardée comme ayant permis d’assurer une publicité appropriée de la conclusion du marché public attaqué, de nature à faire courir le délai de recours contentieux sans qu’à cet égard la société Sic Etanchéité puisse utilement se prévaloir des dispositions de l’article 85 du code des marchés publics ».

Le parallélisme des formes se n’impose qu’en matière de marchés formalisés. Le requérant a cependant interjeté appel.

Retrouvez ce billet sur le site du Village de la justice

mardi 20 novembre 2012

Critères d'attribution des MAPA par Benoit Fleury


Critères d’attribution des MAPA par Benoit Fleury


Nous avons déjà eu l’occasion sur ce blog de souligner l’importance du contentieux en matière de commande publique et, par là, la place centrale occupée par le juge administratif. Celui-ci poursuit son office et une récente décision éclairera les praticiens en matière de critère d’attribution des marchés à procédure adaptée (MAPA).

L’affaire GIE Groupement des poursuites extérieures, déjà évoquée à propos des marchés de prestations juridiques, fut également l’occasion pour le Conseil d’Etat de rappeler que même en procédure adaptée, le pouvoir adjudicateur était tenu d’indiquer, en cas de pluralité de critères, leur hiérarchisation ou pondération.

En l’espèce, la Direction départementale des finances publiques des Hauts-de-Seine avait publié un avis d’appel public à la concurrence le 1er février 2012 pour la passation d’un marché, selon une procédure adaptée, ayant pour objet l’intervention d’huissiers ou de structures d’huissiers de justice en vue du recouvrement amiable de créances, amendes, condamnations pécuniaires et produits locaux pris en charge par les comptables de la direction générale des finances publiques.

1 - Rappel des règles applicables en matière de MAPA


En MAPA, le pouvoir adjudicateur pouvant parfaitement retenir d’autres critères d’attribution que le seul prix, le règlement de consultation du marché litigieux prévoyait que les offres seraient classées en fonction de quatre critères ainsi énumérés :
  1) engagement et justification de l’huissier ou de la structure à respecter les dispositions des cahiers des charges en matière d’échanges dématérialisés ;
Benoit-Fleury-MAPA  2) dimensionnement de l’étude (nombre de collaborateurs dédiés au recouvrement des créances prises en charge par les comptables de la DGFIP, nombre de donneurs d’ordre pour lesquels l’étude travaille déjà, plages horaires de réception des appels en provenance de la DGFIP, capacité maximale de traitement par mois…) ;
  3) moyens techniques dont dispose l’huissier ou la structure à la réalisation de la phase comminatoire (envois de courriers, messages, relances téléphoniques, déplacements…) ;
  4) fréquence et stratégie d’utilisation des moyens techniques pour le traitement d’un dossier donné (nombre, rythme et nature des relances…)

2 - Motivation du requérant


Benoit-Fleury-MAPAUn candidat malheureux a saisi le juge du référé précontractuel en soulevant notamment l’absence d’indications précises quant à la mise en œuvre de ces critères. Le directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine avançait de son côté que les critères étaient hiérarchisés par ordre d’importance. L’argument pouvait porter dans la mesure où la jurisprudence a récemment pu estimer que, en vertu de l’article 28 du Code des marchés publics qui incite le pouvoir adjudicateur à s’inspirer des règles de la procédure formalisée mais sans les rendre obligatoire, la pondération des critères de sélection des offres prévue à l’article 53 du Code pour les procédures formalisées, ne s’impose pas en cas de procédure adaptée ; et le juge de considérer qu’en ayant indiqué dans l’avis d’appel public à la concurrence que les offres seraient évaluées selon trois critères énoncés par ordre décroissant, le pouvoir adjudicateur a satisfait à son obligation d’information des candidats sur les critères d’attribution du marché (CAA Lyon, 5 avr. 2012, MPC Avocat, n° 10LY01016 : Contrats et Marchés publ. 2012, 187).

3 - Solution


Argumentation des juges du fond


Son argumentation n’a toutefois pas été retenue par le juge administratif de Cergy-Pontoise pour lequel le pouvoir adjudicateur « en n’indiquant pas avec suffisamment de précision les conditions de mise en œuvre de critères d’attribution du marché selon des modalités appropriées à l’objet aux caractéristiques et au montant dudit marché, le pouvoir adjudicateur a commis un manquement aux obligations de mise en concurrence » (TA Cergy-Pontoise, ord., 26 avr. 2012, n° 1202866). Le magistrat a, en conséquence, annulé la procédure.

Principe général


Benoit-Fleury-MAPAIl fait ici une application parfaite d’un principe général mis en avant par le Conseil d’Etat et imposant aux pouvoirs adjudicateurs de donner aux candidats une information appropriée sur les critères d’attribution des marchés (CE, sect., 30 janv. 2009, ANPE, n° 290236 : Contrats-Marchés publ. 2009, comm. 121, note W. Zimmer). La Haute juridiction a d’ailleurs expressément étendu cette exigence aux procédures adaptées :
« Considérant que les marchés passés en application du code des marchés publics sont soumis aux principes qui découlent de l’exigence d’égal accès à la commande publique rappelés par le II de l’article 1er du même code ; que les marchés passés selon la procédure adaptée prévue à l’article 28 du même code sont soumis aux dispositions de son article 1er, comme tous les contrats entrant dans le champ d’application de celui-ci ; que pour assurer le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l’information appropriée des candidats sur les critères d’attribution d’un marché public est nécessaire dès l’engagement de la procédure d’attribution du marché, dans l’avis d’appel public à la concurrence ou le cahier des charges tenu à disposition des candidats ; que, dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d’autres critères que celui du prix, l’information des candidats doit alors également porter sur les conditions de mise en œuvre de ces critères » (CE 24 fév. 2010, Cté de communes de l’Enclave des papes, n° 333569 : Rev. Jurid. de l’économie publique 2010, comm. 38, note F. Brenet).

4 - Application par le Conseil d’Etat


Rien d’étonnant donc à ce que le Conseil d’Etat applique un raisonnement identique au cas d’espèce en précisant que le règlement de consultation ainsi rédigé ne peut être regardé comme ayant énoncé clairement que les critères d’attributions étaient hiérarchisés par ordre décroissant. Dès lors, le pouvoir adjudicateur n’a pas porté aux candidats une information appropriée sur les conditions de mise en œuvre des critères d’attribution du marché. Ce manquement est susceptible, dans l’esprit des sages du Palais royal d’avoir lésé le requérant qui aurait pu préciser son offre si le pouvoir adjudicateur avait clairement indiqué ses intentions. Peu importe à cet égard que l’ensemble des candidats aient été placés sur le même terrain.

Retrouvez cette chronique sur le Village de la justice et sur Legavox